En Bretagne, deux data centers de petites tailles sont en construction par Stratosfair . Les collectivités locales facilitent son implantation en attendant la rédaction des appels d’offres qui permettront de choisir un stockage local et frugal. Le data center dans les champs est possible – et il existe déjà. Plusieurs entreprises prennent le contre-pied du gigantisme des data centers hyperscales, c’est-à-dire supérieurs à 10 000 m2 ou à 100 mégawatts, et misent sur de multiples sites de petites tailles disséminés sur le territoire. Pour les collectivités, c’est l’occasion de faire émerger des entreprises locales, de gagner en souveraineté, et de penser le data center comme un producteur de chaleur.
Parmi ces nouveaux acteurs, se trouvent par exemple Qarnot dont les installations servent de chauffe-eau, ou Datafarm qui est couplé à une unité de méthanisation . En Bretagne, à Lanester, l’entreprise Stratosfair déploie ses data centers alimentés par des ombrières solaires et valorise la chaleur fatale dans des serres ou des industries de séchage. Son but est de viser les villes de moins de 20 000 habitants pour proposer du stockage de données ou de matériel aux collectivités et aux PME du territoire. Ses mini-data centers sont certifiés « tiers 3 », soit la meilleure qualité de service pour le stockage de données. Cela inclut trois sources d’énergie, la vidéosurveillance et la double adduction fibre.
« Nous avons rencontré le fondateur de l’entreprise en décembre 2021 lors d’une réunion où il présentait son projet à la députée Nicole Le Peih », se souvient Christine Le Strat, maire de Pontivy et vice-présidente en charge du développement économique de Pontivy communauté. « Sa start-up ne s’est pas lancée sur notre territoire, mais il était en lien avec un informaticien d’ici, il travaille avec des partenaires locaux, sa démarche est écologique et il donne la possibilité de stocker les données à proximité. Tous les voyants étaient au vert alors nous avons mis à disposition un terrain et nous nous sommes engagés à mettre en avant l’entreprise ».
Décentraliser l’information
Le terrain de 1 000 m2 mis à disposition par la mairie va permettre de construire le deuxième data center d’un réseau qui veut en déployer sept. Le premier site, à Lanester, est plus petit, seulement 500 m2. Il comporte 200 m2 de panneaux solaires et 80 m2 de containers maritimes reconditionnés pour accueillir huit baies de serveurs informatiques chacun. « C’était un essai », précise Bérenger Cadoret, le fondateur de l’entreprise Stratosfair . « Le site de Pontivy sera plus standardisé, avec 400 m2 de panneaux solaires, et les futurs data centers seront faits sur son modèle ».
L’entrepreneur présente un projet centré sur l’écologie. « Cela passe d’abord par la production d’électricité renouvelable. L’enjeu est de maîtriser le coût de l’énergie. Les gros data centers compensent l’électricité qu’ils consomment. Nous, nous faisons de l’autoconsommation. Entre 60 et 80 % de notre électricité est produite par l’ombrière solaire, en fonction du taux de charge. C’est-à-dire qu’à l’installation, un site possède huit baies de serveurs auto-alimentées à 80 %. Ensuite, le data center monte à seize baies, ce qui fait descendre l’autoconsommation à 60 % ».
Récupération de chaleur
Puissance électrique nécessaire : 240 kilowatts. Contre plusieurs dizaines de mégawatts pour un centre de stockage de grande taille. En cas de problème, le data center est également branché au réseau, avec un contrat souscrit à Enercoop. La petite taille de l’installation lui permet de ne pas avoir à se raccorder aux postes sources principaux, et donc de s’éloigner des lignes haute tension. Enfin, un groupe électrogène au fioul se trouve sur site. Il doit tourner une fois tous les six mois pour des raisons de sécurité mais Stratosfair a également déposé un dossier auprès de l’Ademe pour tester des piles à combustible hydrogène.
Deuxième axe : la récupération de chaleur. « En Bretagne, cette énergie va être utilisée pour chauffer une serre mais dans la région Nord, nous serons accolés à un centre de méthanisation », relate Bérenger Cadoret. La petite taille de l’installation facilite l’utilisation de chaleur fatale mais le manque de retour d’expérience ne permet pas de calculer le gisement d’énergie. Aujourd’hui, il n’existe pas de modèle économique pour cette valorisation, mais il pourrait s’agir d’un axe intéressant pour les collectivités afin d’orienter les appels d’offres vers des data centers locaux.